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La Cité des Cieux, monde des îles et des bateaux volants...
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3 août 2007

Chapitre 14, par Trianna : Où on apprend le pourquoi du comment de la cuisine d'Edele

- Edele !

J'entendais cette voix et j'avais ouvert les yeux avec lourdeur. J'ignorais ce qu'il m'était arrivé mais je ne m'étais jamais sentie aussi lourde mais la douleur avait disparu. J'avais juste eu le temps d'apercevoir que j'étais dans la cabine du capitaine et que Sawin était là à mon chevet. Elle avait fait un sourire en me voyant.

- Ne bougez pas. Je vais appeler le capitaine.

Elle se dirigea vers la porte et en l'ouvrant, elle poussa un petit cri de surprise.

- Mais qu'est ce que vous faites ici Sumire ?

- Heu, mais rien du tout ! Je me promenais et je...je voulais voir si notre cuisinière allait bien.

Je voyais le visage de Sumire se couvrir de sueur et elle n'était pas du tout à son aise. Mais elle tentait de garder son calme apparent avec difficulté. Mais Sawin ne fit pas trop attention.

- Elle vient de reprendre connaissance et j'allais justement prévenir le capitaine.

- Je peux lui parler ?

- Bien-sûr mais faites attention à ne pas trop la brusquer car elle a encore un peu de fièvre même si ça a diminué.

- Mais oui, vous pouvez compter sur moi !

Sawin partit en laissant la porte libre d'accès à Sumire qui pénétra dans la pièce en fermant rapidement la porte. Elle s'assit à mon chevet et me regarda avec une étrange expression mêlant curiosité, soulagement et contentement.

- Alors Edèle, ça va ?

Cependant, j'avais l'esprit un peu embrouillé car j'avais fait un horrible cauchemar : de mystérieuses silhouettes menaçantes me poursuivaient, j'entendais des cris d'horreur, il y avait du poison...Le poison.

- Non, pas ça ! criai-je sans réfléchir.

- Comment ça, "non, pas ça" ? demanda Sumire avec les yeux écarquillés.

- Qu...quoi ? Qu'est ce qui se passe ?

- C'est ce qu'on aimerait bien savoir, dit une voix masculine venant du dos de Sumire.

Le capitaine entra avec Sawin et intima l'ordre à Sumire de sortir.

- Mais non, protesta cette dernière. Edele allait dire un truc intéressant, je veux tout entendre !

Je sentais que j'avais fait une bourde en laissant transparaître ma pensée avec ce "non, pas ça !" et un poids énorme pesait sur mon coeur. Mais il ne faut pas qu'ils sachent. Pas la vérité.

- Sortez ! criai-je en essayant de faire diversion. Il y a trop de monde, j'étouffe ! Allez-vous-en !

- C'est vrai alors ! s'exclama Sumire. Tu nous caches quelque chose ! J'ai entendu à la port..

- Quoi ? coupa vivement le capitaine. Tu nous espionnais ?

Sous la colère, le capitaine oublia la politesse du "vous" mais personne n'y fit attention. Sumire pâlit de terreur et se mit à gratter nerveusement les plis de ses vêtements.

- Mais capitaine, je...commença-t-elle avec une petite voix, paralysée de peur.

- Ne discutez pas ! Sortez ! Et que je ne vous voie plus dans les parages !

La sentence du capitaine frappa comme la foudre sur la tête de Sumire qui prit rapidement les jambes à son cou. Sawin ferma ensuite la porte et se dirigea vers moi avec le capitaine mais je ne voulais pas les voir.

- Non ! criai-je. Je vous ai dit de partir alors partez !

- Pas avant de vous entendre, mademoiselle, dit le capitaine avec une voix plus neutre.

- Vous parliez dans votre sommeil et je vous ai entendu, déclara le médecin. Vous disiez que..

- Non, vous n'avez rien entendu ! protestai-je. J'avais fait simplement un cauchemar.

- Justement, reprit Sawin. Mais vous disiez dans ce cauchemar : « Non, pas ça... Ils ne doivent pas savoir ce que j'ai fait, jamais... ». De quoi s'agit-il ? Qui sont les "ils" ?

Je tremblais à entendre ces mots sans pouvoir me contrôler. D'horribles vagues de souvenirs commencèrent à remonter à la surface sans que je puisse mettre une barrière de censure à ma conscience. Des images terribles se mirent à défiler devant mes yeux et c'était insupportable. Je ne savais plus quoi faire, mon esprit était bouleversé. C'est trop tard, on m'a entendu dire ce qu'il ne fallait pas entendre. J'étais coincée, tiraillée par la peur. Les ombres menaçantes recommençaient à me hanter.

- Non, laissez-moi ! criai-je en sanglotant. Je ne veux plus faire ça, plus jamais !

Sawin m'avait prise dans ses bras pour me consoler car je n'en pouvais plus. J'avais craqué. Je pleurais de toutes les larmes de mon corps.

- Calmez-vous Edele, ça va aller. Vous êtes en sécurité ici, dit doucement Sawin.

- Non ! Je suis en sécurité nulle part. S'ils me trouvent...Je suis sure que si je suis clouée ici, c'est à cause d'eux. Je ne tombe jamais malade comme ça subitemment.

- Ah, je comprends mieux alors l'origine de la flèche empoisonnée qui vous a été destiné, dit Sawin. Vous avez eu beaucoup de chance de vous en sortir.

- La flèche ? demandai-je. Mon dieu ! Ils m'ont retrouvé alors !

- Qui ? demanda le capitaine resté muet durant tout ce temps. De qui parlez-vous ?

- Expliquez-nous, m'encouragea Sawin. Tout ce que vous direz restera dans cette pièce.

Son regard était chaleureux mais j'étais troublée. Mon esprit hésitait mais à contrecoeur, je décidai de parler. J'enlevai ma couverture pour me mettre à l'aise, le dos calé devant un coussin moelleux. Cependant, je n'étais pas rassurée du tout : j'avais térriblement peur de la réaction de Sawin et du capitaine mais aussi de toute l'équipage. Et l'éventualité que mes anciens bourreaux ont retrouvé ma trace...C'est le début de la fin, de MA fin.

- Je savais qu'un jour tout ça va remonter à la surface, à mon grand désespoir...commençai-je tristement. Tous ces crimes, tous ces morts...

Le capitaine allait réagir mais Sawin lui fit signe de ne pas m'interrompre et elle m'intima du regard à poursuivre.

- Ca n'aurait pas dû commencer. A cause de moi, pleins de gens sont morts.

Je tremblais en disant tout ça mais il fallait que je tienne le coup. Je n'osais même pas regarder les visages de mes deux interlocuteurs. Et je me suis tût un moment.

- Mais ce n'est pas de ma faute ! m'exclamai-je brutalement en redressant la tête. On m'a demandé de tuer ces gens sinon...

- ...Sinon ? demanda timidement Sawin.

- Je ne serai plus là pour vous parler en ce moment même, répondis-je en baissant la voix.

- Qu'avez-vous fait ? demanda le capitaine, légèrement anxieux.

- ...Morts par empoisonnement, continuai-je d'une voix de plus en plus entrecoupée par les sanglots. Le poison tue dans le secret...

- Dans le secret ? demanda Sawin les yeux ronds d'incompréhension.

- Mon talent de cuisine. J'étais si brillante à l'époque de mon adolescence : je faisais des plats magnifiques savourés par les plus grandes personnalités de ce monde. Mais la mort emportait chacun d'entre eux car ces plats étaient empoisonnés. On me demandait de déguiser le poison dans la nourriture car j'étais malheureusement douée, trop douée pour savoir rendre le poison indétectable dans le plat. On me donnait le liquide de la mort et je faisais tout le sale boulot. Comme je me déteste ! Mon talent de cuisine est une malédiction !

Un silence de mort régnait dans la pièce sans que quiconque n'ose troubler le mutisme. Mais je ne voulais pas qu'on me pose des questions. Je voulais que tout ça se finisse de n'importe quelle manière même si ma vie et ma dignité devaient y passer.

- Un jour, j'ai réussi à tromper la vigilance des bourreaux et je me suis échappée, repris-je immédiatement. Et je suis venue ici dans l'espoir d'oublier tout ce passé car j'ai un mal effroyable chaque fois que j'y pense. Et dire que je croyais pouvoir construire une nouvelle vie ici...Mais c'est raté : l'image du poison du meurtre de Druand m'a rappellé trop d'évènements douloureux. J'ai tué, je ne suis maintenant plus qu'une tueuse, une empoisonneuse, une fugitive. La cuisinière Edele n'existe plus...

Je baissais les yeux en attendant ma mort que je savais imminente non seulement parce que tout le monde allait me mépriser et je n'avais plus rien à attendre de la vie encore moins de la réaction de Sawin et du capitaine. Enfin, je m'étais sentie plus libre et même la fièvre avait disparu.

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